Un professeur-romancier prétentieux a l’habitude d’infliger à sa femme encore séduisante la lecture de ses écrits ; un jour, assis à son bureau et occupé à la rédaction de son roman Le tissu compétitif, il commence à ressentir une chaleur étrange, les mots ne sortent plus de sa plume, il étouffe, voit ou croit voir sa bibliothèque se fendre comme un rideau de théâtre, dévoilant sa femme nue et provocante. Fin de la vision : sa femme accourt, appelle un médecin ; deux personnages tout de blanc vêtus l’emmènent et lui, alors en transe et convaincu qu’il va recevoir un honneur académique, a le temps d’adresser à sa femme un salut professoral et grotesque. « On allait tout de même lui rendre justice ! » Or, cette caricature du professeur aux prises avec sa langue semble l’emporter sur le développement de l’action ou de l’intrigue : comme ailleurs dans son œuvre, Owen préfère le tableau psychologique ou le portrait moral, où le temps de la narration est suspendu en une pause . La caricature, se configurant comme une variation sur le thème du « bavard » (à l’instar du diseur de rien des Caractères de Théophraste, par exemple, ou des œuvres morales de Plutarque), est donc une forme discursive anti-narrative. Il reste à se demander si cela suffit à l’interpréter comme une subversion interne au genre fantastique, qui consisterait en un déplacement de certaines caractéristiques du récit, notamment sa fonction déroutante, à la langue et à son imaginaire.

La subversion dans la langue. Configurations discursives du fantastique chez Thomas Owen / Fernando Funari. - STAMPA. - (2022), pp. 93-104.

La subversion dans la langue. Configurations discursives du fantastique chez Thomas Owen

Fernando Funari
2022

Abstract

Un professeur-romancier prétentieux a l’habitude d’infliger à sa femme encore séduisante la lecture de ses écrits ; un jour, assis à son bureau et occupé à la rédaction de son roman Le tissu compétitif, il commence à ressentir une chaleur étrange, les mots ne sortent plus de sa plume, il étouffe, voit ou croit voir sa bibliothèque se fendre comme un rideau de théâtre, dévoilant sa femme nue et provocante. Fin de la vision : sa femme accourt, appelle un médecin ; deux personnages tout de blanc vêtus l’emmènent et lui, alors en transe et convaincu qu’il va recevoir un honneur académique, a le temps d’adresser à sa femme un salut professoral et grotesque. « On allait tout de même lui rendre justice ! » Or, cette caricature du professeur aux prises avec sa langue semble l’emporter sur le développement de l’action ou de l’intrigue : comme ailleurs dans son œuvre, Owen préfère le tableau psychologique ou le portrait moral, où le temps de la narration est suspendu en une pause . La caricature, se configurant comme une variation sur le thème du « bavard » (à l’instar du diseur de rien des Caractères de Théophraste, par exemple, ou des œuvres morales de Plutarque), est donc une forme discursive anti-narrative. Il reste à se demander si cela suffit à l’interpréter comme une subversion interne au genre fantastique, qui consisterait en un déplacement de certaines caractéristiques du récit, notamment sa fonction déroutante, à la langue et à son imaginaire.
2022
978-2-87574-661-0
Du fantastique à ses subversions dans la littérature belge francophone
93
104
Fernando Funari
File in questo prodotto:
File Dimensione Formato  
FUNARI 2022 La subversion dans la langue. Configurations discursives du fantastique chez Thomas Owen.pdf

Accesso chiuso

Tipologia: Pdf editoriale (Version of record)
Licenza: Open Access
Dimensione 247.01 kB
Formato Adobe PDF
247.01 kB Adobe PDF   Richiedi una copia

I documenti in FLORE sono protetti da copyright e tutti i diritti sono riservati, salvo diversa indicazione.

Utilizza questo identificatore per citare o creare un link a questa risorsa: https://hdl.handle.net/2158/1296651
Citazioni
  • ???jsp.display-item.citation.pmc??? ND
  • Scopus ND
  • ???jsp.display-item.citation.isi??? ND
social impact