Dans les pages suivantes, je m’efforcerai d’apporter ma contribution, en tant qu’historien de la société et de la politique, à l’analyse des révoltes et des crimes politiques à la lumière de leur nature intrinsèquement juridique. Le thème des révoltes fait l’objet d’un regain d’intérêt depuis ces dernières années chez les spécialistes du moyen âge tardif européen. Ne serait-ce que durant la dernière décennie, une douzaine de monographies, divers actes de congrès et d’innombrables articles ont été publiés . Beaucoup de ces travaux ont repris le paradigme de recherche qui, depuis le XIXe siècle, a lié l’interprétation et la narration des révoltes à l’idée de “révolution”: idée déclinée – selon les prédilections idéologiques de chacun (libérales, conservatrices ou marxistes) – en termes d’action illégitime contre l’État, de subversion envers les ordres du pouvoir, de contestation de classe ou de “protestation populaire” . Mais le plus intéressant est que la notion même de “révolte” commence à être mise en discussion par certains auteurs. Et la conscience que cette notion ne fût élaborée qu’en plein âge moderne commence à apparaître. Le terme lui-même de “révolte”, comme on le sait, ne se trouve pas dans les sources du moyen âge tardif: en Italie, par exemple, l’attestation la plus ancienne se trouve dans les écrits de Francesco Guicciardini au début du XVIe siècle; et les occurrences dans les pays francophones sont contemporaines . Les orientations de recherche les plus prometteuses apparaissent désormais celles qui prennent en compte de vastes contextes de conflictualité politique à l’intérieur desquels se formaient des coalitions d’intérêts, visant des objectifs déterminés, et qui pouvaient aboutir à des actes de violence. Longtemps, les priorités qui ont caractérisé le débat interprétatif sur les révoltes se sont concentrées sur les attributs sociologiques: leur nature, leur cause, les protagonistes sociaux, leur signification politique, etc. Au contraire, nous nous dirigeons vers une réflexion sur la “légitimité” des actes de violence, en sachant que la mise en question des autorités politiques pouvait comporter une signification autre que celle de la subversion. Je comparerai deux aspects du discours politique et juridique qui s’affrontèrent dans l’Italie communale et seigneuriale (mais pas seulement) du moyen âge tardif: d’un côté, celui élaboré par les acteurs du conflit, de l’autre celui suivi par les autorités.
Révoltes et crimes politiques dans l'Italie communale et seigneuriale / Andrea Zorzi. - STAMPA. - (2013), pp. 213-233.
Révoltes et crimes politiques dans l'Italie communale et seigneuriale
ZORZI, ANDREA
2013
Abstract
Dans les pages suivantes, je m’efforcerai d’apporter ma contribution, en tant qu’historien de la société et de la politique, à l’analyse des révoltes et des crimes politiques à la lumière de leur nature intrinsèquement juridique. Le thème des révoltes fait l’objet d’un regain d’intérêt depuis ces dernières années chez les spécialistes du moyen âge tardif européen. Ne serait-ce que durant la dernière décennie, une douzaine de monographies, divers actes de congrès et d’innombrables articles ont été publiés . Beaucoup de ces travaux ont repris le paradigme de recherche qui, depuis le XIXe siècle, a lié l’interprétation et la narration des révoltes à l’idée de “révolution”: idée déclinée – selon les prédilections idéologiques de chacun (libérales, conservatrices ou marxistes) – en termes d’action illégitime contre l’État, de subversion envers les ordres du pouvoir, de contestation de classe ou de “protestation populaire” . Mais le plus intéressant est que la notion même de “révolte” commence à être mise en discussion par certains auteurs. Et la conscience que cette notion ne fût élaborée qu’en plein âge moderne commence à apparaître. Le terme lui-même de “révolte”, comme on le sait, ne se trouve pas dans les sources du moyen âge tardif: en Italie, par exemple, l’attestation la plus ancienne se trouve dans les écrits de Francesco Guicciardini au début du XVIe siècle; et les occurrences dans les pays francophones sont contemporaines . Les orientations de recherche les plus prometteuses apparaissent désormais celles qui prennent en compte de vastes contextes de conflictualité politique à l’intérieur desquels se formaient des coalitions d’intérêts, visant des objectifs déterminés, et qui pouvaient aboutir à des actes de violence. Longtemps, les priorités qui ont caractérisé le débat interprétatif sur les révoltes se sont concentrées sur les attributs sociologiques: leur nature, leur cause, les protagonistes sociaux, leur signification politique, etc. Au contraire, nous nous dirigeons vers une réflexion sur la “légitimité” des actes de violence, en sachant que la mise en question des autorités politiques pouvait comporter une signification autre que celle de la subversion. Je comparerai deux aspects du discours politique et juridique qui s’affrontèrent dans l’Italie communale et seigneuriale (mais pas seulement) du moyen âge tardif: d’un côté, celui élaboré par les acteurs du conflit, de l’autre celui suivi par les autorités.File | Dimensione | Formato | |
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